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Chroniques Kerrozeniennes
12 mai 2016

441 - L'élagueur fou.

 

Assis sur son fauteuil, le pastis à portée de la main, l'élagueur fou a préparé minutieusement son plan. Il sait qu'il doit d'abord attaquer les branches extérieures encore assez fines. Il caresse son 22 long rifle d'une main douce et faussement négligente. Le regard acéré, pointé sur l'adversaire, il en mesure les difficultés. Il sait que de deux balles bien placées il peut abattre chaque branche.  
La concentration monte doucement comme la sève de celui qu'il va affronter. Tout à l'heure, avec un arc et des flèches courbes, il a installé un sytème de cordages qui retiendra les branches dans leur chute. Il empoigne son verre de pastis et le porte doucement à ses lèvres. C'est une sorte de rituel qui l'amène prés de la concentration maximum, celle qui le fait réussir à 100 %. Une longue gorgée, sans quitter l'arbre des yeux, et soudain il pose le verre. Ca y'est le corps tout entier est comme une arbalète. D'un geste sec il enclenche le chargeur et épaule la carabine. deux, quatre, six détonations claquent, trois branches s'écroulent dans un craquement sinistre, et restent suspendues comme des pantins désarticulés.
 
L'élagueur fou ne peut réprimer un petit sourire, jamais il ne se lassera de cette émotion qui l'étreint lorsque le boulot est bien fait. Dix fois il porte le pastis à ses lèvres, dix fois les six détonations brisent le silence. Quand il se lève enfin, les applaudissements emplissent la place. Il salue.
 
D'un pas souple, il s'approche des branches pendantes et immobiles. Il sort son revolver, et d'un geste sûr et souple à la fois, il tire deux, trois fois et coupe net les cordages qui retiennent les bouts de bois sans vie. Ils tombent dans un grand fracas, directement dans la benne qui a été placée dessous, comme un immense cercueil pour des grands fauves enfin inoffensifs.
 
La mitrailleuse est posée par terre, prés du fauteuil. L'élagueur fou, se sert un pastis bien serré, d'un jaune brun presque marron. Il en boit une longue, trés longue gorgée, qui irradie dans son corps la chaleur de l'alcool. Avec l'adrénaline qui monte insensiblement, le mélange va être explosif. Il se baisse, et la lourde mitrailleuse se love dans son bras droit  comme une danseuse de tango lors d'un pas renversé. La main gauche se plaque avec une force incroyable sur le corps de l'arme, et souléve la gueule béante droit vers l'arbre pétrifié. Une, deux trois rafales déchirent le silence respectueux de la place, et dans un craquement horrible, semblable au cri du dragon agonisant, trois grosses branches, énormes et tordues s'écroulent sur le sol dans un bruit d'enfer. Une clameur sort de la foule et enveloppe l'élagueur fou qui s'essuie le front d'un geste machinal.  
 
Avec un geste théâtral d'une grande beauté, il fait disparaitre le pastis dans son gosier brûlant et s'incline devant la foule enthousiaste.
 
Epuisé, il laisse les sous-fifres ramasser les branchages épars, et rentre chez lui. Il doit encore préparer quelques arbres pour demain...

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