448 - S'impliquer

L'implication est une seconde nature chez moi. Je suis un impliqué de naissance. Dès mes premiers moments sur cette planète, je me suis impliqué dans la qualité des biberons qu'on tentait de me faire ingurgiter, et n'ai plus jamais cessé de m'impliquer dans tout ce qui m'entourait, parfois même avec un peu trop d'ardeur. Péchés de jeunesse, mes implications actuelles sont plus sereines, et depuis que j'ai renoncé définitivement à me présenter à l'élection au poste de Président de la République, je ne m'implique plus que dans des domaines plus ludiques. Je m'empresse de préciser que ce n''est pas à la suite d'un scandale quelconque que j'ai pris cette décision, ni financier, ni sexuel, ni les deux à la fois comme certains, éblouis par la composition de mon portefeuille boursier et mes performances amoureuses laisseraient volontiers croire. 
 
Non, plus prosaïquement, il s'agit de ma participation passée à cette belle course nommée Jules Verne, dans laquelle j'ai montré des dispositions qu'on peut qualifier d'extraordinaires, et qui n'ont pas été accueillies à leur juste valeur par un quarteron de virtuelo-voileux jaloux et médisants. J'étais né pour la Jules, il n'y a pas à tortiller, c'est une évidence. Parti la fleur au fusil et le sourire aux lèvres, je n'étais pas conscient moi-même de l'énorme potentiel que je représentais, et j'ai piloté négligemment lors des premiers milles. C'est sans doute un peu trop tard que je me suis aperçu que les capacités insoupçonnables dont la nature m'avait pourvu étaient si démesurées que malgré ma négligence je me plaçais malgré tout parmi les vainqueurs possibles, que j'ai réalisé qu'il me fallait réagir. Et, dans des conditions horribles et d'une dureté incroyable, j'amenais mon bateau à la quinzième place, vous avez bien lu, la quinzième ! Trop fort le Kéro !!! 
 
Tout ceci pour dire humblement que je n'ai plus rien à prouver sur cette course, et que j'attends de mes détracteurs une performance qui leur permette de me donner des leçons de Julevernisme. C'est pas demain la veille... 
 
J'ai donc posé un bateau sur le plan d'eau pour voir ce que faisaient ces critiqueurs sans envergure, et je ne vois rien.   Mes tableaux, universellement reconnus parmi les meilleurs, ne peuvent être établis pour des coursinettes sans intérêt. J'attends de voir quelques concurrents sortir un peu du lot pour que je m'intéresse un peu à eux. Mais tout ceci est encore assez terne. 
 
Oh ! J'en entend bien quelques uns qui disent : "Eh ben, mon petit bonhomme, t'as qu'à la faire la course puisque t'es aussi fort !" Je leur répondrais que d'abord je ne suis par leur petit bonhomme, et qu'ensuite je fais la course si je veux !!! 
 
Et je finirai en affirmant que mon bateau n'est pas échoué sur une quelconque grève pourrie, mais posé délicatement sur un fond de sable fin, en attendant des jours meilleurs. Donc pas de déchéance.